On lit et entend régulièrement à propos des cours d’histoire des contre-vérités telles que « On ne parle pas du colonialisme dans les cours d’histoire », « Les femmes n’ont aucune place dans les cours d’histoire » ou « L’école voit l’histoire par les gens d’en haut et jamais par les gens d’en bas ». Ceux qui profèrent ces propos ne semblent pas avoir fréquenté les cours d’histoire récemment et ne se sont pas renseignés sur ses mutations.
Par Anne Morelli
En effet, les « programmes » (le terme est désuet mais au moins plus compréhensible que « référentiels ») ont changé et s’ouvrent aujourd’hui à ces sujets de l’histoire, même si nous pouvons encore estimer cette évolution trop lente et très dépendante de la personnalité des enseignant(e)s. L’histoire des migrations elle-même a fait une (encore timide) entrée dans les programmes et le colonialisme est bien aujourd’hui un concept-clé, obligatoire et incontournable.
Un volume, publié avec l’appui de la FWB, comme « Femmes et hommes dans l’histoire, un passé commun » (gratuitement disponible en ligne), date déjà d’il y a presque dix ans et propose aux enseignants des documents pour construire un cours d’histoire vraiment mixte hommes/femmes. De son côté, l’histoire de l’industrialisation ne peut plus aujourd’hui être abordée à travers les seuls « capitaines d’industries » mais aussi via la prolétarisation des travailleurs et leurs formes de résistances. Nous regrettons encore cependant l’européocentrisme des programmes et manuels, l’absence des facteurs économiques dans l’histoire des guerres et l’invisibilité des luttes sociales après 1936. Nous aimerions un regard moins binaire sur la guerre froide ou la construction européenne…
Mais comment un professeur peut-il se tenir au courant des nouveaux débats, publications et expositions et intégrer un regard critique dans son enseignement ?
L’ Association belge des professeurs d’histoire de langue française, née au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, avait déjà pour but, à travers sa revue « Histoire et enseignement« , de présenter aux professeurs les nouvelles publications et activités culturelles utiles à leur enseignement. Il y a une dizaine d’années, cette revue papier a muté en un site éponyme. On y trouve les documents officiels (« programmes ») des différents réseaux, des séquences pédagogiques utilisables en classe, des compte rendus critiques d’outils pédagogiques (livres, films, expos…), mais aussi des points de vue à débattre. La rubrique internationale, intitulée « Ailleurs » nous informe sur les aléas qu’affrontent les cours d’histoire en Italie et en France, en Corée du Sud et en Palestine/Israël, mais aussi au Congo et au Québec.
Le site est géré par des bénévoles, professeurs d’histoire en activité ou retraités. Pendant le confinement le site a survécu grâce à des apports de matériel pédagogique à utiliser en classe mais ne demande qu’à s’étoffer de nouveau. Célestin Freinet disait déjà aux enseignants: « Ne restez pas seuls ». Si vous êtes un professeur d’histoire « critique », n’hésitez pas à prendre contact avec « Histoire et enseignement » et à collaborer à son site.