C’est reparti ! Après les congés de carnaval commence la période des inscriptions en première secondaire. L’occasion pour nous de rappeler qu’il existe des alternatives à la galère que l’on impose aujourd’hui aux parents.
Au lendemain des congés de carnaval, les parents des écoliers de 6e primaire vont être contraints de choisir, dans l’offre du marché de l’enseignement, les écoles secondaires dont ils croient pouvoir imaginer, sur base de publicités et de rumeurs en tous genres, qu’elles répondent le mieux aux besoins leur enfant (ou aux projets d’avenir qu’ils croient devoir nourrir en fonction de ce qu’ils pensent être le bonheur futur de leur enfant). Mais ça ne suffira pas. Les parents devront aussi tenter d’estimer la probabilité d’obtenir une place dans telle ou telle de ces écoles, en fonction de l’indice composite des distances entre maison, école primaire et école secondaire, en fonction de la composition de leur famille, en fonction de l’indice socio-économique du secteur géographique où ils habitent, etc. Enfin, s’ils disposent de bonnes connaissances en statistiques et probabilités — ou s’il sont un ami travaillant comme mathématicien dans une compagnie d’assurance — ils pourront établir la liste des trois écoles qui maximisent leurs chances d’obtenir l’enseignement le plus adapté à (ce qu’ils croient être) leurs attentes. Mais sans jamais pourvoir espérer réduire à zéro le risque d’un refus d’inscription dans les trois écoles choisies, donc le risque de se voir imposer finalement une école dont on ne veut absolument pas.
Ce « parcours du combattant », comme le nomme judicieusement Pierre Bouillon dans Le Soir, irrite et inquiète à juste titre les papa et les maman des écoliers. Mais l’erreur, des journalistes comme des parents, est d’y voir le résultat d’une volonté excessive de régulation.
Car l’absence de régulation n’est manifestement pas une solution. Cela signifierait le retour au système du « premier arrivé, premier inscrit » ou, pire encore, à l’arbitraire des enfants que l’on refuse sans motif et des places que l’on réserve discrètement pour les amis des connaissances du directeur. Pour ceux qui doivent s’inscrire en maternelle ou en primaire, pour ceux qui doivent changer d’école en cours de secondaire, il n’y a pas de régulation. Et là, comme jadis en première secondaire, le parcours du combattant est bien pire : ce sont les longues journées passées à faire la tournée des écoles qui vous répondent « complet »…
Notre alternative
Pourtant, il est parfaitement possible de mettre fin au calvaire des parents en introduisant le système d’inscription défendu depuis plusieurs années par l’Aped.
Il s’agit tout simplement de commencer par proposer une école aux parents. Cette proposition se fera sur base de divers critères tels que la proximité (du domicile ou du lieu de travail, au choix), le regroupement des fratries et la quête d’une mixité sociale aussi élevée que possible dans chaque établissement.
Les parents disposeront ensuite d’un temps de réflexion. S’ils acceptent l’école proposée, c’est fini, ils auront échappé au « parcours du combattant » ; ils auront la garantie d’avoir une place dans une école géographiquement accessible et qui ne sera pas un ghetto social ou académique. Au contraire, si les parents préfèrent décliner l’offre qui leur aura été faite, ils pourront, au terme de la période de réflexion, s’engager librement sur le marché scolaire (où il restera forcément un nombre de places identique au nombre de parents qui auront refusé l’école proposée). Cette seconde phase pourrait même être soumise à une régulation moins contraignante que le système actuel.
Dans notre proposition, ce système serait mis en oeuvre pour toutes les années d’étude communes : pour les inscriptions en maternelle, en primaire et en début de secondaire, y compris pour les changements d’école en cours de cycle. Idéalement, il devrait aussi être introduit en même temps que la séparation géographique entre le secondaire inférieur (l’école commune) et le secondaire supérieur (les années de spécialisation). Enfin, l’idéal serait de l’accompagner d’une fusion des réseaux ; à défaut il faudra demander préalablement aux parents s’ils acceptent ou non qu’on leur propose une école confessionnelle, mais ceci pourrait déjà introduire une légère ségrégation sociale puisque les pratiques religieuses sont statistiquement corrélées à l’origine sociale.
Voilà un mode de régulation des inscriptions qui n’aurait que des avantages. D’abord en assurant davantage de mixité (sociale et académique) dans les écoles il permettrait de s’attaquer à notre record mondial des inégalités scolaires. Ensuite, il permettrait de résoudre la contradiction entre deux droits : la liberté de choisir son école et l’assurance d’une bonne école proche de son domicile.
Pour le reste, il ne faut qu’un peu de courage politique, Madame Milquet…