La production du politologue Paul Ariès ne faiblit pas, avec des thématiques variées d’un ouvrage à l’autre. L’hypothèse, originale, soutenue dans cet essai s’inscrit dans les principes de l’objection de croissance, dont l’auteur est un des principaux chantres en France. Nous sommes arrivés au stade de l’hypercapitalisme, qui a accouché d’un hyperconsommateur n’ayant plus rien à voir avec le simple consommateur des Trente Glorieuses, puisqu’il ne connaîtrait, comble du comble, qu’une « jouissance sans désir » ! Ariès distingue les différentes époques de l’attitude sociale face aux biens : celle de l’usage, celle de la consommation et enfin celle de l’hyperconsommation, qui aboutit, d’une part à la généralisation de la « junk production » dont le capitalisme a besoin pour se pérenniser, et d’autre part au mésusage, par exemple lorsqu’on utilise l’eau pour remplir sa piscine plutôt que pour préparer le repas. L’auteur prône ainsi la gratuité de l’usage juste et durable des ressources, cette gratuité étant justement « l’Interdit majeur qui structure la société hypercapitaliste ». Logiquement, il réclame en retour le renchérissement du mésusage. Ainsi, les pauvres n’auraient pas à participer à la facture environnementale dans les mêmes proportions que les nantis. Finalement, n’aurait-on pas là une variante écologique du slogan marxiste « faites payer les riches » ?
ARIÈS Paul, « Le mésusage. Essai sur l’hypercapitalisme », éd. Parangon, Lyon, 2007, 173 p.