Le 3 mars 2007, l’Aped lançait officiellement son programme «Vers l’école commune», notre vision stratégique pour une réforme en profondeur de l’enseignement en Belgique. Au cours de longs débats, au sein de notre association, nous avons construit une vision commune qui s’appuie sur un argumentaire solide. C’est cet argumentaire que nous vous présentons aujourd’hui, sous la forme d’une «foire aux questions» (FAQ).
Chacune des propositions du programme a donc été passée au crible d’une critique implacable, à laquelle nous répondons point par point.
Le texte complet du programme “Vers l’école commune”
Nous voulons aller vers une école qui assure à chacun, durant dix années, une formation à la fois générale et polytechnique; une école sans filières, sans sélection, sans réseaux, sans discrimination sociale ou religieuse. Un système d’enseignement où tous les enfants aient droit à une école de qualité, proche de leur domicile.
Nous souhaitons une école dotée de moyens humains suffisants, de programmes exigeants et rigoureux, mais disposant d’une grande autonomie sur le plan pédagogique, afin d’être réellement une école ouverte sur la vie et une école de la réussite.
Nous sommes conscients que ce programme est ambitieux, qu’il
paraîtra irréaliste aux yeux de beaucoup. Et nous ne somme pas
naïfs. Nous savons que les rapports de force politiques sont, actuellement, loin de favoriser une telle réforme. Mais c’est précisément pour changer ces rapports de force que nous voulons, par
ce programme, poser les vrais débats. Sans tabous. En revanche, ce programme a été soigneusement réfléchi. Puissent nos propositions être débattues le plus largement possible. N’hésitez donc pas à ajouter de nouvelles questions, en utilisant le forum (au bas de cette page ou au bas des réponses) ou encore en nous écrivant.
Notre vision de l’école et nos constats
– Vous semblez regretter que l’école ne soit un lieu d’éducation et de socialisation ? Ne l’est-elle pas déjà ?
– Vous ne changerez pas le monde !
– Tous capables ? Vous y croyez vraiment, vous, aux « élèves tous capables » ?
– Celui qui n’en veut pas, on n’en fera rien.
– Les droits des élèves, d’accord, mais que faites-vous de leurs devoirs ?
– L’enseignement flamand est l’un des plus performants au monde. Pourquoi le changer ?
– N’est-ce pas une bonne chose de tirer les élites vers le haut ? N’est-ce pas la meilleure garantie pour que tous montent plus haut ?
– Est-ce qu’on n’attend pas trop de l’école ? Et les parents ? Et la société ?
1. Une école de base commune, de 6 à 15 ans
– L’obligation scolaire à 3 ans, n’est-ce pas une pression sociale excessive ?
– Une école commune de 6 à 15 ans. Et avant 6 ans ?
– Vous envisagez une même école de 6 à 15, donc une redistribution des entités scolaires. Dans un unique bâtiment ? Et que faites-vous des écoles de village ?
– Votre école commune, c’est irréaliste : mes élèves de 3ème professionnelle ne suivront pas dans un tel enseignement !
– Il y a des esprits concrets et des esprits abstraits, des manuels et des intellos… Les premiers ne risquent-ils pas de s’ennuyer dans les cours généraux ?
– Certains élèves s’ennuient déjà dans les cours généraux. Et vous voulez en rajouter ?
– Ne risquez-vous pas de faire augmenter le nombre d’échecs ?
– 16 ans, n’est-ce pas trop tard pour entamer une formation professionnelle ?
– Mais il y aura tout de même une sélection à partir de 16 ans ? Qu’est-ce que ça change si vous ne faites que retarder l’inégalité ?
– Comment allez-vous orienter les jeunes en fin d’enseignement de base ?
– L’enseignement sera encore plus inadapté aux besoins de l’économie
– La concurrence entre écoles et entre réseaux n’accroît-t-elle pas la qualité de l’enseignement ?
2. Une formation générale et polytechnique pour tous
– Il est totalement impossible de poursuivre tous ces objectifs dans le temps scolaire !
– Plus de temps à l’école ? Ils s’y ennuient déjà !
– Et l’évaluation ? Tous les cours devront-ils être réussis ? Tous auront-ils le même poids ?
– L’école ne formera plus de maçons et de menuisiers, alors ?
– Quelle est la place de la formation professionnelle dans votre vision ?
– Et les professeurs de cours techniques et de pratique professionnelle, que vont-ils devenir ?
– Vous parlez de « valorisation de l’acte productif » : n’y a-t-il pas là un risque de marchandisation ? De contrôle de l’école par le patronat?
– Votre programme est-il idéologiquement neutre ?
– Vous parlez de formation liée au travail. N’est-ce pas déjà un peu le but des mini-entreprises?
– Ne faudrait-il pas aussi développer l’esprit d’entreprise ?
– Et les « surdoués », qu’en fait-on ?
3. Une affectation (prioritaire) des élèves aux écoles
– Et que faites-vous de la liberté de choix ? De la liberté des parents ?
– Beaucoup de parents veulent pouvoir choisir une école de qualité pour leur enfant. Où est le mal ?
– La suppression de la liberté du choix de l’école ne provoquera-t-elle pas une recrudescence d’initiatives privées ? Les plus riches ne finiront-ils pas par garder leurs enfants à la maison, payer des enseignants pour leur donner des cours privés et recréer ainsi des écoles privées d’élite ??
– Mais ne pourrait-on pas concilier liberté de choix et équité ?
– Limiter le choix des parents ? N’est-ce pas un peu trop « révolutionnaire » et, pour tout dire, irréaliste ?
– Mais, en France, la « carte scolaire » ne fonctionne pas. Les familles des classes supérieures ou moyennes y échappent en déménageant dans les quartiers « huppés », en choisissant des « options » d’élite ou en plaçant leurs enfants dans l’enseignement privé sous contrat.
– Comment allez-vous traiter, par exemple, le cas de la commune de Lasne (la plus riche de Belgique) ? Comment la rendre socialement mixte ?
– En saupoudrant les mauvais élèves un peu partout, n’allez-vous pas provoquer un nivellement par le bas et empêcher l’émergence des élites intellectuelles dont la nation aura toujours besoin ?
– Ne va-t-on pas, en supprimant la stimulation due à la concurrence entre les écoles, appauvrir leurs contenus et leurs initiatives pédagogiques ?
– La suppression des examens de passage ne risque-t-elle pas de renforcer l’échec scolaire, au bout du compte, en supprimant cette traditionnelle « seconde chance » laissée à l’élève ?
– Peut-il y avoir quand même une souplesse en cours d’année (pour l’élève comme pour l’école) ? Exemples : renvoi pour problème disciplinaire grave, ou problèmes psycho-relationnels…
– Et si l’ambiance de l’école ne me plait pas ?
4. Une fusion des réseaux
– Et que faites-vous de la liberté religieuse ?
– L’enseignement libre n’est-il pas plus efficace que l’officiel ? Plus humain ? Plus ouvert ? Pourquoi changer ce qui fonctionne bien ?
– L’existence d’établissements confessionnels ne représente-t-elle pas un rempart contre l’intégrisme (leur interdiction ayant pour effet pervers de cristalliser les rancoeurs) ?
– La liberté d’enseignement est dans la Constitution !
5. Un encadrement suffisant pour zéro décrochage
– 15 par classe, est-ce le seul moyen pour que la classe progresse ensemble ?
– Ne faut-il pas un accueil et une formation spéciale pour les enfants primo-arrivants ?
– Tout le monde réussit ? Il n’y aura plus de motivation à étudier !
– Et les élèves qui ont des difficultés particulières ? Ils passent aussi ?
– Mais, avec vos remédiations, les élèves vont être casernés à l’école !
6. Une école ouverte
– Concrètement, qu’est-ce que cela signifie pour l’école de s’ouvrir vers d’autres lieux ?
– Les écoles ouvertes le soir et le week-end ? N’êtes-vous pas en contradiction avec votre souhait de laisser à l’enfant du « temps pour soi » ?
– Dans votre projet, l’école va-t-elle prendre la place des parents ? Quel temps leur restera-t-il pour s’occuper de leurs enfants ?
– Ne risque-t-on pas de voir des parents faire pression sur l’école et définir ses contenus (comme aux Etats-Unis, où le créationnisme revient en force dans l’enseignement au détriment de Darwin) ?
– Les parents bourgeois prendront le pouvoir dans l’école !
– N’êtes-vous pas en train de réintroduire l’autonomie des écoles que vous avez toujours combattue ?
– Le projet est beau, mais si le reste de la société demeure elle-même dans une logique néolibérale, l’Ecole ne peut évoluer artificiellement en dehors d’elle. L’école démocratique ne suppose-t-elle pas alors un changement général du système, sinon préalable, au moins concomitant ?
7. Retrouver un équilibre dans les pratiques
– On lit bien entre vos lignes une critique de l’approche par les compétences. Cette pédagogie n’est-elle pourtant pas plus progressiste que les pédagogies traditionnelles ?
– Vous parlez de « pratiques respectueuses du rapport au savoir des enfants du peuple »: quelle(s) pratique(s) par exemple ?
– Et si nous avons un projet spécifique et que nous voulons le défendre (par exemple, école Freinet ou Decroly) ?
– Quelle importance accordez-vous à la formation et au recyclage des enseignants ?
8. Des programmes rigoureux, lisibles et cohérents
– Et que fait-on de toute la réforme actuelle ? Des compétences ? A la poubelle ?
– Quel(s) sont ces savoir(s) à réactualiser régulièrement ? Des exemples ?
9. Evaluation
10. Refinancer l’école à hauteur de 7% du PIB
– Notre enseignement n’est-il pas déjà l’un des plus coûteux au monde ?
– Mais les dépenses d’éducation n’ont-elles pas continué d’augmenter ces dernières années ?
– Mais n’y a-t-il pas eu un nouveau refinancement suite aux accords de la St Polycarpe ?
– Pourquoi dites-vous que le budget de l’enseignement ne pourrait augmenter que par une révision de la loi de financement ?
– De quel montant le budget devrait-il augmenter pour atteindre le niveau relatif de 1980 ?
– D’où viendra l’argent pour financer votre projet d’école?
– Mais l’enseignement n’est pas tout seul. Que faites-vous des autres besoins de la société ?
– Sans moyens supplémentaires, c’est tout votre projet qui s’effondre ?
> Ecole commune :
vos questions, nos réponses
Avez-vous pensez aux enfants qui ne savent pas se concentrer sur une matière, ne savent pas rester devant un cours pour l’étudier?
Ce n’est pas pour rien qu’aujourd’hui ils ont la possibilité d’êre plus manuel, si ces écoles existent c’est pour quelque chose, non?!?
Franchement, je les vois mal se mettre à étudier en un coup, s’ils ne sont pas studieux c’est pas grâce à votre nouvelle réforme qu’ils vont le devenir…
> Ecole commune :
vos questions, nos réponses
Permettez-moi de vous répondre par une série de questions auxquelles je vous invite à répondre à votre tour :
– pourquoi les enfants de milieux populaires auraient-il davantage de difficltés à « se concentrer sur une matière » et à « rester devant un cours » que les autres ?
– pourquoi ce qui semble impossible chez nous est-il possible ailleurs ?
– le caractère plus ou moins « studieux » d’un élèves est-il un don du ciel ?