10. Refinancer l’école à hauteur de 7% du PIB

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Notre enseignement n’est-il pas déjà l’un des plus coûteux au monde ?
Mais les dépenses d’éducation n’ont-elles pas continué d’augmenter ces dernières années ?
Mais n’y a-t-il pas eu un nouveau refinancement suite aux accords de la St Polycarpe ?
Pourquoi dites-vous que le budget de l’enseignement ne pourrait augmenter que par une révision de la loi de financement ?
De quel montant le budget devrait-il augmenter pour atteindre le niveau relatif de 1980 ?
D’où viendra l’argent pour financer votre projet d’école?
Mais l’enseignement n’est pas tout seul. Que faites-vous des autres besoins de la société ?
Sans moyens supplémentaires, c’est tout votre projet qui s’effondre ?

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Ce que dit le texte du programme de l’Aped :

Refinancer l’école à hauteur de 7% du PIB

Pour financer notre projet, assurer une authentique gratuité de l’école et de ses activités annexes, il faudra que l’Etat consacre de nouveau 7% de son PIB à l’enseignement (comme à la fin des années ‘70). Sans doute plus durant la période de transition (10 ans), mais on pourra en récupérer progressivement une partie sur le coût de l’échec scolaire, des filières, des options et des réseaux, et grâce à une utilisation plus rationnelle des infrastructures.

Ce refinancement ne peut se faire que via une révision de la loi de financement des communautés ou via un retour de l’école dans le giron fédéral. Et certainement pas au détriment d’autres besoins de la société (notamment des autres services publics) et des revenus modestes. Une taxation plus adéquate des bénéfices des entreprises et du patrimoine des plus privilégiés d’entre les Belges devrait largement suffire.

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Notre enseignement n’est-il pas déjà l’un des plus coûteux au monde ?

La part du PIB (Produit Intérieur Brut) que la Belgique consacre à l’enseignement correspond au niveau moyen des pays européens. Cependant, notre pays compte, proportionnellement, davantage d’élèves et d’étudiants, parce que la scolarité commence plus tôt, parce que la scolarité est obligatoire jusqu’à 18 ans, parce que les taux de redoublement sont élevés dans le secondaire et parce que la participation à l’enseignement supérieur, en Belgique, est une des plus élevées d’Europe. De ce fait, les dépenses par élève sont, chez nous, à un niveau relativement faible en comparaison à d’autres pays européens.

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Mais les dépenses d’éducation n’ont-elles pas continué d’augmenter ces dernières années ?

C’est vrai en valeur nominale (en euros) et même en valeur réelle (compte tenu de l’inflation). Mais en valeur relative, c’est-à-dire par rapport à l’évolution de la richesse nationale, les dépenses belges d’éducation ont chuté de 7% en 1980 à 6% aujourd’hui.
Cette diminution s’explique par deux facteurs. Durant les années 80, l’enseignement a subi de sévères mesures d’austérité budgétaire qui ont fortement réduit les normes d’encadrement dans l’enseignement secondaire rénové et augmenté le temps de travail des enseignants. En 1989, l’enseignement a été communautarisé. En vertu de la loi de financement du 16 janvier 1989, les dotations fédérales aux communautés flamande et francophone furent gelées au niveau de 1988. Ce montant fut seulement indexé et adapté à l’évolution de la population âgée de 3 à 18 ans. Ceci explique pourquoi les dépenses d’enseignement n’ont pu suivre le rythme de croissance du PIB après la communautarisation. De plus, la dotation ne tient pas compte de la croissance du nombre d’étudiants dans l’enseignement supérieur.

Ce mécanisme de financement ne permettait aucune augmentation salariale au-delà de l’index, à moins de réduire l’emploi. En 1990-91, les enseignants francophones ont dû mener de longues grèves pour obtenir une revalorisation salariale. Suite à cela, un refinancement limité fut obtenu en 1993 (par le transfert des taxes audiovisuelles aux communautés), mais cela ne suffit pas pour éviter une suppression de 3000 postes dans l’enseignement francophone en 1995-1996, malgré une nouvelle grève de longue durée.

En Communauté flamande, la dotation fédérale fut d’emblée complétée par un transfert important de la Région flamande vers la communauté. Une opération plus aisée au nord du pays, parce que Région et Communauté ont fusionné et que la situation économique est plus favorable en Flandre.

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Mais n’y a-t-il pas eu un nouveau refinancement suite aux accords de la St Polycarpe ?

La loi spéciale de financement de 1989 a en effet été complétée le 13 juillet 2001 par une nouvelle loi spéciale, résultat d’un accord communautaire dit « accord de la Saint Polycarpe ». Cet accord prévoyait des moyens supplémentaires cumulatifs à partir de 2002: 200 millions d’euros en 2002, 150 millions en 2003, 370 millions en 2005 et 125 millions en 2006. A partir de 2007, ce sont encore 25 millions qui viennent s’ajouter chaque année jusqu’en 2011. A partir de 2007, la dotation fédérale aux communautés sera également adaptée à la croissance économique. En résumé, on peut dire que depuis 2002, les dépenses d’éducation ont légèrement augmenté par rapport au PIB et qu’elles seront définitivement liées au PIB à partir de 2007 (avec encore une légère croissance jusqu’en 2011). Il reste que le fossé par rapport aux 7% de 1980 est encore loin d’être comblé.

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Pourquoi dites-vous que le budget de l’enseignement ne pourrait augmenter que par une révision de la loi de financement ?

Comme nous l’avons expliqué, la loi spéciale de financement signifie que, même après les modifications de la loi de 2001, les dotations restent cadenassées à un niveau inférieur à celui de 1980. Un tel « corset budgétaire » n’existe dans aucun autre pays. En Belgique, le Parlement fédéral n’a même pas la possibilité de voter, à une majorité simple, une augmentation des dépenses éducatives. Il doit passer par une loi spéciale qui exige une majorité des deux tiers et une majorité simple dans chacun des groupes linguistiques.

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De quel montant le budget devrait-il augmenter pour atteindre le niveau relatif de 1980 ?

Pour faire passer les dépenses de 6% du PIB à 7%, il faut 1% de 325 milliards (qui est le montant du PIB), soit 3,25 milliards. Selon la clé de répartition actuelle, cela ferait à peu près 2 milliards pour la Communauté flamande et 1,25 milliards pour la communauté française.

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D’où viendra l’argent pour financer votre projet d’école?

La Belgique est un pays riche. Au cours des douze dernières années, les bénéfices des entreprises ont été multipliés par trois. Le patrimoine des Belges les plus fortunés a fortement augmenté, en raison de la croissance de la valeur des biens immobiliers et des évolutions boursières à long terme. Les 10% les plus riches possèdent 50% des fortunes. Lors des grèves des enseignants francophones en 1996, la CGSP-enseignement a lancé un programme de revendications fiscales qui n’a rien perdu de son actualité: impôt sur la fortune, augmentation des taux d’imposition sur les bénéfices des entreprises, imposition des revenus mobiliers au même niveau que les revenus du travail, lutte contre la fraude fiscale.

Etant donné que les dépenses d’éducation sont constituées pour 80% de salaires, un refinancement de l’enseignement permettra le recrutement de plusieurs dizaines de milliers de personnels supplémentaires. Une partie importante des dépenses seront donc récupérées par l’Etat sous forme d’impôt des personnes physiques, de recettes de sécurité sociale et de diminutions des allocations de chômage.

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Mais l’enseignement n’est pas tout seul. Que faites-vous des autres besoins de la société ?

C’est sûr : il faut également davantage de moyens pour les soins de santé, les pensions, les transports en commun, le logement social, l’environnement. C’est pourquoi les luttes des enseignant ne peuvent être dissociées des luttes sociales et syndicales sur d’autres terrains. Cela doit également nous inciter à éviter le gaspillage des moyens sur le terrain qui est le nôtre. Certes, notre projet d’école commune réclame davantage d’encadrement, des équipements pour la formation polytechnique, de meilleurs moyens didactiques. Mais à terme, des économies pourront également voir le jour. La fusion des réseaux et l’affectation des élèves aux écoles, que nous préconisons, conduiront à une utilisation plus rationnelle des moyens disponibles (meilleure utilisation de l’infrastructure, moins de frais de transport scolaire, suppression de services qui font deux ou trois fois le même travail). La réduction drastique des taux de redoublement diminuera le nombre total d’élèves dans l’enseignement obligatoire. Le tronc commun jusqu’à 16 ans permettra d’éviter le phénomène de classes sous-peuplées engendrées par la multiplication des « options ».

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Sans moyens supplémentaires, c’est tout votre projet qui s’effondre ?

En effet. Nous ne partageons pas l’avis de ceux qui affirment qu’on peut « faire mieux avec moins de moyens ». Un refinancement important de l’enseignement est une condition sine qua non d’une réforme progressiste en profondeur de nos systèmes éducatifs.