Marc Demeuse est maître de conférences à l’Université de Liège. Il a collaboré avec des chercheurs d’autres universités européennes (dont l’UCL) à une recherche destinée à dégager un ensemble d’indicateurs permettant d’évaluer l’équité des systèmes éducatifs européens. Le chercheur liégeois a accordé une interview à l’Agence Alter Educ de laquelle il ressort quelques éléments intéressqants. « C’est en prenant du recul sur les systèmes que l’on peut, par exemple, comprendre que ce n’est pas parce qu’on est d’origine défavorisée qu’il est normal que l’on réussisse moins bien à l’école. Cela varie en effet d’un système éducatif à l’autre » déclare Demeuse. Pas de fatalité donc. Néanmoins l’enquête montre que, dans les faits, c’est le plus souvent la discrimination qui domine. On se trouve alors devant « un cas de figure où les résultats (…) sont déterminés socio-économiquement et en plus, les groupes les plus favorisés sont aussi ceux qui bénéficient de meilleures infrastructures ». Se basant sur les données de l’enquête PISA, il est normal que, comme la récente étude publiée par l’Aped, le rapport de recherche classe l’Allemagne et la Belgique parmi les mauvais élèves en ce domaine. Les pays nordiques occupant sans surprise la tête du classement. Le chercheur constate aussi que « les systèmes qui créent la différence (les systèmes créateurs d’inégalité ndlr) en dehors de l’école développent la même pratique dans les écoles ». A la question de savoir si, pour travailler sur le système éducatif, il faut aussi s’intéresser à des enjeux de type socio-économique, voici la réponse intégrale de Marc Demeuse : « Oui, cela permet de déculpabiliser l’école ce qui ne l’excuse pas. Cela replace le débat que l’on peut tenir dans le monde de l’enseignement dans son ensemble. En Belgique, on n’a pas l’impression que la société francophone veut une autre école. Je crois que l’on a l’école que l’on mérite. Notre société est relativement ségrégative, basée sur des piliers … et l’école lui ressemble « naturellement ». Tout le monde demande à choisir son école. Et ce n’est pas que le réseau libre qui est responsable de cette situation. C’est une vieille histoire qui s’est aujourd’hui prolongée dans la liberté et l’individualisation des choix. Cette tendance est propre à la Belgique (mais elle s’observe aussi dans d’autres systèmes, comme aux Pays-Bas). Chez nous, on met en avant la liberté de choix et pas la qualité de l’enseignement ».
Alter Educ, 2/6/03