Pour une école démocratique

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1. Notre société dominée par les « lois du marché » cause chaque jour des ravages. L’Appel Pour une Ecole Démocratique (Aped) se bat afin que chaque jeune puisse acquérir les savoirs et les compétences qui donnent force pour comprendre le monde et pour participer à sa transformation vers plus de justice. L’Aped est un mouvement d’action et de réflexion. Il s’adresse aux enseignants, éducateurs, étudiants, parents, chercheurs, syndicalistes à qui la démocratisation de l’enseignement tient à cœur.

Critique de l’Ecole

2. Aujourd’hui, les enfants ne sont pas égaux devant l’Ecole. Par son fonctionnement, ses structures, ses méthodes, ses contenus, l’enseignement reproduit les inégalités d’origine sociale. Il les transforme en inégalités de résultats et en inégalités d’orientation scolaire.
3. L’Ecole actuelle ne forme pas des jeunes « complets ». Déjà au sortir de l’Ecole primaire, beaucoup n’ont pas acquis les compétences de base et les connaissances générales indispensables. Par après, les uns sont spécialisés de manière précoce dans un métier ou une formation technique ; ils ne maîtrisent souvent ni la richesse de leur langue d’enseignement ni l’histoire des sociétés humaines ni une culture scientifique satisfaisante. D’autres suivent un enseignement général qui en fait des « analphabètes technologiques », qui les coupe de tout contact avec la réalité du monde du travail. Bref, il semble que l’Ecole s’intéresse moins à l’instruction de tous qu’à la formation de travailleurs productifs et hiérarchisés.
4. L’Ecole n’apprend pas assez aux jeunes à comprendre la société. Elle ne leur offre pas le bagage de savoirs et de compétences qui leur permettrait de critiquer ce qui ne tourne pas rond et d’en découvrir les causes et les mécanismes : l’inégalité Nord-Sud, le chômage, les dangers liés à la domination des marchés, l’absurdité de la surproduction quand des centaines de millions d’enfants souffrent de malnutrition. Au lieu de cela, on charge l’Ecole d’inculquer le respect pour ce système prétendument démocratique.
5. La recherche scientifique pratiquée dans les universités et les Hautes écoles est souvent contrôlée par des sociétés privées et orientée en fonction de leurs intérêts mercantiles.

L’Ecole démocratique

6. Tous les jeunes devraient jouir d’une vaste et solide formation à la fois théorique et pratique, générale et polytechnique ; une approche aussi complète que possible des sciences, des technologies, de la philosophie, de l’histoire, des relations économiques et sociales, des cultures. Il ne faut pas qu’une spécialisation précoce ou excessive vienne entraver cet objectif essentiel.
7. Nous apportons une attention particulière aux savoirs qui contribuent à développer la réflexion personnelle et la critique intelligente ; la connaissance des faits et des mécanismes de l’injustice, de la misère, de l’exploitation, que ce soit chez nous ou dans le reste du monde ; la compréhension des potentialités et des dangers des technologies.
8. Il faut aussi doter tous les jeunes des compétences qui permettent de participer efficacement à l’action sociale ou politique : langues, arts, moyens de communication, etc.
9. Nous refusons toute discrimination, toute sélection sociale ou ethnique. Mais également toute concession quant au niveau et à la qualité de l’instruction.
10. Nous voulons diffuser et généraliser, sans a priori, toutes les pratiques pédagogiques qui favorisent une réussite scolaire de haut niveau chez les enfants d’origine populaire.
11. Tous les enfants devraient trouver à l’école l’encadrement et l’aide individualisée que certains trouvent aujourd’hui à la maison et qui constitue souvent la clé de leur réussite scolaire.
12. L’enseignement – y compris l’enseignement supérieur – doit être entièrement gratuit : livres, cahiers, syllabus, activités extra-scolaires, matériel, outils, etc.
13. L’Ecole démocratique doit être une école publique. Ceci ne pourra être réalisé que par le rejet de tout sectarisme, par un dialogue franc entre les acteurs progressistes des différents réseaux.
14. Nous refusons fermement la privatisation et la « marchandisation » de l’Ecole. L’enseignement doit rester indépendant des groupes de pression patronaux. L’élève ne peut devenir un « client ».
15. Nous voulons une Ecole qui assure de véritables droits aux élèves et aux professeurs : droits politiques, droit de participer à l’élaboration des règlements et à l’organisation de la vie scolaire.
16. Nous voulons une Ecole qui entretienne un dialogue étroit avec tous les parents.
17. Nous voulons une Ecole qui soit un lieu de vie, d’expérimentation, d’expression pour les jeunes ; où les apprentissages soient liés à la pratique sociale, à la vie quotidienne, à l’acte technique et à la production.

Des moyens suffisants

18. Une telle Ecole devra être dotée de moyens supplémentaires afin d’assurer un encadrement suffisant, des locaux agréables, des moyens didactiques de qualité et une bonne formation des enseignants. Alors que le volume et l’importance des savoirs grandit sans cesse, il est inconcevable que la part de la richesse nationale consacrée à l’éducation soit tombée de 7% à environ 5,5% seulement.
19. Le financement doit être attribué en fonction des besoins et non selon des « enveloppes » arbitraires.
20. Les moyens pour financer un enseignement de qualité existent : il suffit de regarder le niveau atteint par les bénéfices des entreprises, les plus-values boursières, les revenus mobiliers ou les fortunes.

Il faut changer le monde

21. Le « projet éducatif » de l’Aped est inséparable de notre vision du monde. La société actuelle, dominée par les « lois du marché », engendre des injustices et des discriminations inacceptables. Elle conduit l’humanité vers des crises économiques, des guerres, des drames sociaux, des catastrophes alimentaires, sanitaires et écologiques. Cette domination de l’argent et du profit constitue, à l’échelle planétaire, une atteinte fondamentale aux principes de démocratie et une menace pour l’avenir de l’Homme.
22. Des rapports sociaux plus justes et plus rationnels sont nécessaires et possibles : des rapports qui permettraient une répartition équitable des ressources, des biens et des services, un accès partagé à la culture et aux arts, une utilisation des technologies au service de tous et d’un développement durable.
23. Des rapports sociaux plus justes permettraient enfin d’envisager la fin de la division entre « manuels » et « intellectuel », entre exécutants et dirigeants. Cette division est à la base de l’Ecole inégale que nous connaissons.
24. Nous soutenons par conséquent les actions qui s’inscrivent dans un projet de transformation progressiste de la société.

Fonctionnement

25. Nous oeuvrons parmi toutes les communautés linguistiques de Belgique et dans tous les réseaux d’enseignement. Nous y favorisons la solidarité mutuelle et l’unité dans l’action.
26. Quiconque partage le projet défini ici et accepte d’assumer une part de responsabilité dans sa réalisation peut être admis comme membre de l’Aped.