Le supplément 1er janvier du Soir destiné à nous remonter le moral en expliquant que « tout va très bien Mme la marquise et bonne année 2020 », contient une pleine page consacrée à l’enseignement. Dominique Lafontaine, Madame PISA pour la Belgique francophone et experte auprès des acteurs du Pacte d’excellence y est invitée à dire tout le bien qu’elle pense de ce processus et à louer le « courage du législateur ».
Et puis, surprise. Quand le journaliste, Eric Burgraff, l’aiguillonne un peu : « Mais tout ceci nous met bien sur la voie du changement ? », Lafontaine répond : « Je me réjouis pour le tronc commun car les pays qui ont pris cette direction ont récolté des effets positifs, loin d’un nivellement par le bas. Par contre, il faut être conscient que la formule qu’on va tester chez nous n’a pas d’équivalent strict ailleurs. On ne peut donc pas affirmer avec certitude que cela va fonctionner. Les contextes dans lesquels le système évolue peuvent faire capoter le processus… »
Burgraff insiste : « À quoi pensez-vous ? »
Dominique Lafontaine : « Je ne connais pas de tronc commun actif dans un système éducatif où les différences entre écoles sont aussi importantes que chez nous. Je rappelle que deux grands tabous n’ont pas été mis en question dans le cadre du Pacte : la liberté de choix de l’école et l’existence des réseaux. Si on l’avait fait, on risquait l’implosion… Les exemples historiques de troncs communs réussis sont situés dans le nord de l’Europe. Très bien, mais on voit que la Suède et la Finlande commencent à libéraliser leurs écoles avec déjà des effets négatifs visibles. C’est la démonstration que ce qui faisait la qualité c’est bien leur projet originel. »
En clair, Dominique Lafontaine confirme ce que l’Aped écrit depuis de lustres : mettre en place un tronc commun dans un contexte de libre marché scolaire générateur de ségrégations sociales et académiques, c’est courir le risque sérieux d’aller à échec : augmentation des inégalités sous couvert d’un tronc commun formel ou nivellement par le bas.
On aurait envie d’applaudir à cette analyse si lucide, si scientifique et si rare. Malheureusement Dominique Lafontaine rentre dans le rang et reprend le rôle qui lui est assigné: « Mais je reste résolument optimiste, c’est important pour que ce qui est mis en route fonctionne ».
On appelle cela la méthode Coué, non ?